Dans de nombreux pays en proie à une agitation importante, des coupures, ou des blocages du réseau internet interviennent de manière très opportune. A ce jeu-là, le continent africain n’y échappe pas. Dernièrement en Algérie, l’accès à YouTube et Google a été bloqué après la diffusion d’une vidéo critique sur l’armée. De nombreuses ONG, tirent la sonnette d’alarme pour mettre en lumière cette pratique, qui se répand dans d’autres pays du continent pour limiter la portée de diffusions gênantes pour les gouvernements en place.
En ce début du mois d’août, Netblocks, qui est une association de défense des droits numériques dans le monde, affirme sur son site internet et sur Twitter, “YouTube et plusieurs services de Google ont été bloqués jeudi au soir en Algérie par la société publique Algeria Telecom et d’autres grands fournisseurs d’accès Internet”. Ces blocages coïncident avec la publication d’une vidéo de l’ex-ministre algérien de la Défense Khaled Nezzar. Ce général à la retraite de 81 ans, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par le tribunal militaire. Dans cette vidéo, il appelle les autorités militaires de l’Algérie,”à répondre aux demandes du peuple”.
Rien ne prouve expressément, que la coupure soit volontaire, cependant, elle tombe bien. De plus, ce n’est pas une première, ce fut le cas en juin, officiellement pour lutter contre la triche lors des examens du baccalauréat. De même, en février, tout au début de la protestation contre un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika.
Surtout, la coupure du réseau internet pour limiter l’information n’est pas encore suffisamment prise en compte par la communauté internationale, et elle reste largement impunie. Du coup, ses coupures deviennent récurrentes dans de nombreux autres pays. Parmi eux, on peut citer, le Soudan. Une coupure d’Internet est intervenue le même jour, durant lequel 127 personnes avaient péri dans une répression terrible face à un sit-in.
En janvier 2018, le flottement autour des résultats de la présidentielle tendue en RD Congo, oblige les autorités à couper l’accès Internet. Il s’agit d’éviter un soulèvement populaire. Très sérieusement, le Conseil national de sécurité explique, qu’il était impératif de couper Internet pour permettre à la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de terminer la compilation et l’encodage des résultats des élections.
Le Cameroun, est aussi devenu un coutumier de cette pratique. Tout au long de l’année 2017, Internet a été régulièrement coupé et l’accès aux réseaux sociaux limité dans les zones anglophones du Nord et du Sud-Ouest en plein conflit séparatiste depuis novembre 2016.
Phénomène dans une progression inquiétante
De plus, il faut s’inquiéter sur le recours à cette stratégie par de plus en plus de pays. Jusqu’ici, cette pratique faisait partie de l’arsenal répressif des régimes autoritaires. Un pays comme le Bénin, pourtant bien ancré dans la démocratie, a perturbé pour la première fois l’accès à Internet lors des élections législatives de 2019. Selon Julie Owono, directrice exécutive d’Internet sans Frontières, “restreindre l’accès aux réseaux sociaux ou à Internet n’a jamais permis d’arrêter la désinformation ou le discours de haine. Cela n’a jamais marché. D’autres moyens existent. Il faut responsabiliser les plateformes qui ne doivent pas monétiser la haine. Les gouvernants doivent prendre des mesures pour encourager la modération des contenus sur les réseaux sociaux et non censurer systématiquement”.
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