Comme souvent, si les querelles apparaissent d’ordres religieux, on retrouve quelques bons vieux ingrédients qui vous mettent le feu aux poudres et alimentent les rivalités, argent, pouvoir, et influence. Au Monténégro, d’un côté des prêtres accusent le gouvernement de vouloir faire main basse sur leurs monastères et leurs “saintes reliques”. De l’autre, les autorités soupçonnent la principale Église du pays de servir des intérêts venus de la Serbie voisine. Au milieu de cela, un troisième larron attend patiemment son heure et espère représenter une future Église “autonome”.
L’Église orthodoxe serbe (SPC), dont le siège est à Belgrade, représente la grande majorité des orthodoxes du Monténégro. Cependant, son nom a du mal à masquer son divorce d’avec la Serbie en 2006. Il faut dire, que ce divorce met fin à quasi 90 ans de vie commune. Cette proximité des orthodoxes avec la Serbie, n’a jamais vraiment été du goût du gouvernement Monténégrin.
Le gouvernement du président Milo Djukanovic, aux commandes depuis trois décennies de ce petit pays de 620 000 habitants, a décidé d’agir. Il a promulgué fin décembre une loi sur la liberté religieuse, qui pourrait transférer à l’Etat la propriété d’une bonne partie des centaines de monastères, gérés jusqu’ici par la SPC.
La question, n’est pas que spirituelle, les monastères et les reliques représentent une manne financière touristique non-négligeable. Un grand nombre de touristes, visitent les joyaux de la SPC disséminés à travers le pays. Ostrog par exemple, reçoit jusqu’à un million de visiteurs par an. Pour leur part, les “reliques” apparaissent tout simplement “inestimables”.
C’est le moment d’évoquer le fameux “troisième larron, il s’agit d’une petite Église du Monténégro, très minoritaire, non reconnue par le monde orthodoxe, qui tente une “renaissance” depuis le début des années 1990. Elle se targue, être la seule authentique dans ce petit pays. Une fois les églises dans le giron de l’Etat, l’Église orthodoxe du Monténégro espère un compromis avec la SPC, pour que les deux clergés puissent les utiliser et se faire mieux reconnaître.
A Cetinje, se trouve le siège de la SPC, mais aussi celui de l’Église du Monténégro. C’est un imposant monastère pour le premier et une simple maison pour le second. Cela suffit pour entretenir le conflit. C’est alors, que le sujet déborde de la sphère religieuse et révèle une autre facette. Il est aussi question, de l’identité nationale, car dans ce petit pays indépendant, un tiers des habitants s’identifient, comme serbes et se raccroche au SPC, pour ne pas complètement briser le lien avec la Serbie voisine.
C’est pour cela, que pour affirmer une nouvelle fois sa particularité, le Monténégro a besoin de sa propre Église autonome, afin de consolider l’indépendance nationale. Le mot d’ordre est simple, l’Église serbe est en Serbie et l’Église monténégrine est au Monténégro.
En attendant, les orthodoxes de la SPC manifestent leur désapprobation. A l’approche des législatives prévues à l’automne, ce serait aussi une manière de défier le pouvoir en place, pour d’autres raisons que l’orthodoxie religieuse.
Crédit photo : ender vatan